Bilbao, l’équipe du Fou

09/05/2012 à 15:42

En une saison, Marcelo Bielsa a su transformer le visage de l’Athletic Bilbao, qu’il a propulsé en finale de la Ligue Europa ce mercredi face à l’Atletico Madrid. Portrait d’un entraineur finalement pas si fou que l'on peut le penser.

Bilbao, l’équipe du Fou

Le Fou. C’est le surnom par lequel Marcelo Bielsa est connu de tous. « El Loco » en version originale. Un surnom qui semble suivre l’entraineur de l’Athletic Bilbao depuis toujours. Il faut dire qu’il l’a bien cherché. L’Argentin est de la race de ceux qu’on n’oublie pas. Ceux qui oscillent entre l’incompréhensible et le génie. Ceux dont le comportement est à la fois une énigme et un régal. Depuis qu’il a débarqué à Bilbao l’été dernier, Bielsa a tout changé au Pays Basque. Avec ses méthodes, si particulières, il a su faire de l’Athletic cette formidable armada qui a enthousiasmé l’Europe du football. Leur place en finale de C3, les Basques l’ont arraché aux prix de somptueuses batailles face à Manchester United, Schalke 04 ou le Sporting CP. Des batailles où l’influence du « generalissimo » Bielsa s’est fait sentir à chaque seconde. Avec lui, les jeunes Bilbotars ont trouvé plus qu’un entraineur. Ils ont découvert un guide.

Bourreau de travail

A l’inverse d’un palmarès étonnamment toujours dégarni (un titre olympique avec la sélection argentine en 2004 comme seul fait d’arme), les anecdotes sur Bielsa pullulent. Entre des séances vidéo qui durent des heures, des entrainements où « si le préparateur physique n'intervenait pas, il continuait ces séances jusqu'à plus soif », ses anciens joueurs gardent presque à l’unanimité des bons souvenirs de l’Argentin. Car si Bielsa est fou, c’est surtout un fou de travail. Un fou de foot. Du genre à rester enfermer des heures à regarder des cassettes de match pour trouver un ajustement tactique. Et qui place toujours le joueur au centre de ses réflexions. Depuis son arrivée à Bilbao, la progression de certains de ses hommes est fulgurante. Llorente, Munian, Javi Martinez et Iraola sont ainsi passés du statut de bons joueurs de Liga à potentiels titulaires en sélection espagnole. Tout sauf un hasard. L’équipe basque était considérée comme rugueuse et adepte des longs ballons ? Avec Bielsa, Bilbao est devenu une formidable machine à créer des espaces et étouffe ses adversaires avec un pressing permanent et une circulation de balle qui donne le tournis. Une façon de jouer qui demande d’énormes efforts physiques, difficiles à reproduire deux fois par semaine, ce qui explique la saison moyenne des Basques en Liga (10e). Mais qui a fait merveille en Ligue Europa, notamment lors du double affrontement avec Manchester, où les Anglais ont semblé totalement dépassés par la furia basque.

Guardiola, le disciple

Plus que ses résultats, c’est peut-être l’avis des autres entraineurs qui donnent une idée de l’aura naturelle de Bielsa. "J'ai une grande admiration pour lui et je garde le souvenir d'un excellent professionnel " dit de lui Diego Simeone, le coach de l’Atletico Madrid, son adversaire du soir, qui a été sous ses ordres en équipe d’Argentine. Depuis des années, Bielsa entretient surtout une relation presque fusionnelle avec Pep Guardiola, certainement l’entraineur qui s’est le plus inspiré de ses méthodes, depuis leur première rencontre qui avait duré … 11 heures. . « Nous sommes devant l’un des meilleurs entraineurs de la planète. Il pratique un football juste, peu lui importe s’il gagne ou s’il perd. C’est pour ça que je pense que la finale de Coupe du Roi, qui opposera l’Athletic au Barca, sera merveilleuse » expliquait ainsi récemment Guardiola. Des louanges à la pelle qui semblent presque déranger Bielsa le taiseux, qui avait vite répliqué en confiant qu’en « regardant l’œuvre de Pep au Barça et ma carrière, je me demande qui est l’élève et qui est le maître. Non, je ne suis pas le maître, car ce que j’ai apporté au football ne justifie pas cette appellation. » Mardi en conférence de presse, Bielsa est apparu très calme, presque stoïque. Ses mots étaient pesés, justes, limpides. « Quand on aborde un match dont le résultat est irréversible, et à la fin d'une compétition, il y a beaucoup de sensations qui se répètent, le désir, l'ambition, l'anxiété... Les sensations s'amplifient. Mais l'important, c'est que face à l'adversaire, on ait du répondant, c'est la meilleure garantie pour espérer une issue favorable » a-t-il ainsi confié. On sentait poindre la volonté extrême de protéger ses jeunes joueurs avant cette finale si importante pour l’Athletic. Et dire qu’il a failli réussir à nous faire croire qu’il était fou…

Julien HERNANDEZ

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